Dr Daouda Ouédraogo, à propos de l’Apivirine : « l’utilisation du médicament est sûre »

In A la Une, A propos de, Entretien

Dr Daouda Ouédraogo a soutenu sa thèse le 8 décembre 2021 à l’UFR/SDS sur le thème « Etude de la tolérance, de la sécurité et de l’efficacité de l’Apivirine chez des patients adultes atteints de la maladie à Covid-19 sans signes de gravité ». Il s’en est sorti avec une mention très honorable avec félicitation du jury. Dans cette interview, il nous décortique les résultats auxquels il est parvenu en administrant l’apivirine à une quarantaine de malades sans signes de gravité.

 

Santeactu.bf : Qu’est-ce qui vous a motivé à choisir l’apivirine comme thème de soutenance ?

 

Dr Daouda Ouédraogo : C’est une question de curiosité parce que quand le Covid-19 est arrivé au Burkina Faso, les malades ont été hospitalisés au Centre hospitalier universitaire de Tengandogo. Je ne sais pas si c’est une chance ou une malchance, de toute façon, nous faisions partie des premiers à être en contact avec les premiers malades. A la recherche d’un traitement adéquat, il a été proposé au Burkina Faso, l’utilisation de la chloroquine ou de l’hydroxychloroquine associé à l’azithromycine. Comme l’efficacité du produit n’était pas sûre et au vu des effets secondaires de la chloroquine, deux essais cliniques, dont l’apivirine, ont été initiés. Comme on était dans un contexte d’urgence, le gouvernement a sorti une note qui disait de passer à une phase 3 qui suppose l’utilisation du produit à grande échelle. Il s’agissait de prendre un échantillon et voir comment évoluent les malades qui sont sous apivirine et ceux qui sont sous hydroxyde chloroquine. Par la suite, il s’est trouvé que l’apivirine est un phytomédicament dont on ne connaissait pas certains éléments dont la toxicité, la sécurité de l’utilisation. Il a été demandé aux chercheurs burkinabè de faire des études sur la toxicité du médicament sur le rat, puis un essai clinique phase 2 pour connaître la sécurité d’utilisation du médicament sur l’être humain. Au vu du temps mis par cet essai, je me suis approché du Pr Martial Ouédraogo, qui est mon directeur de thèse pour lui demander où en était l’essai clinique sur l’apivirine. Il m’a fait comprendre que comme l’apivirine est un phytomédicament, l’utilisation était restreinte et un peu compliquée par rapport à l’essai clinique. C’est après avoir échangé avec Pr Martial Ouédraogo que j’ai décidé de choisir comme thème de soutenance l’apivirine, qui est un sujet qui me plaît.

 

Quels sont les résultats auxquels vous êtes parvenu ?

 

Les résultats auxquels nous sommes parvenu sont satisfaisants. Notre étude s’est basée sur un échantillon de 45 patients. Dans la logique de l’essai clinique, on doit prendre des patients qui étaient sans signes de gravité. Et au niveau des directives du Burkina Faso, les patients sans signes de gravité étaient à la maison. C’est la difficulté majeure que l’on a rencontré pendant notre étude parce qu’il fallait rejoindre les parents chez eux, discuter avec eux, les enrôler, les traiter. On a remarqué que les 45 patients ont tous toléré l’utilisation de l’apivirine puisqu’on n’a pas eu d’effets indésirables. On a aussi remarqué que l’utilisation était sécurisée. Les deux éléments que l’on recherchait le plus, c’était la sécurité et la tolérance. Comme c’est un phytomédicament, pour pouvoir amener les chercheurs à faire une phase 3, il faut trouver des éléments qui peuvent dire que le produit est efficace.

Notons que l’étude phase 2 peut prendre entre 30 à 80 patients, en fonction des données statistiques. Sur 45 patients, on ne peut pas dire que le produit est efficace à 100%. Mais on a remarqué que sur les 45 patients il y avait 86% des patients qui étaient négatifs après 14 jours de traitement. Compte tenu du fait qu’il fallait se déplacer chez les patients, certains patients ont été différés au 15e jour. Donc au 15e jour, on s’est retrouvé avec 93% de guérison. Il s’agit de la guérison virologique, c’est-à-dire que quand on fait le test PCR, et on dit que c’est négatif. La particularité est qu’on avait un certain nombre de patients qui étaient négatifs au 4e jour de traitement et 48% qui était négatif au 7e jour de traitement. La question qu’on s’est posée « est-ce que si on avait fait le test PCR de ceux qu’on a laissé atteindre le 14e jour, le 10e jour, est-ce qu’il n’allait pas être négatif ». Ensuite, au niveau de la guérison des signes cliniques, notamment la toux, la fièvre et autre, on a remarqué qu’au 4e jour, il n’y avait que deux personnes qui avaient toujours des signes cliniques. Les signes cliniques des autres patients avaient disparu. Il n’y avait que deux personnes qui avait toujours une anosmie, c’est-à-dire  une absence de goût et d’odorat. Au septième jour, la totalité des signes cliniques avaient disparu. Ce n’est pas dû au hasard en tout cas. Ce sont ces éléments qui nous ont conduits à dire que le médicament avait une certaine efficacité. On a appelé cela une efficacité clinique à partir de 7 jours de traitement.

 

L’apivirine est-il un médicament sûr ?

 

L’utilisation du médicament est sûre. Revenons sur la sécurité d’utilisation. Quand on prend un produit, il y a ce qu’on appelle la dose létale. C’est la dose à laquelle si tu prends le médicament en excès cela peut conduire à des effets secondaires. Il se trouve que la dose létale de l’apivirine est de 5 000 mg/kg du poids corporel.

 

A part le Covid-19, existe-t-il d’autres pathologies que l’apivirine est susceptible de soigner ?

 

L’apirivine est utilisé dans le traitement du VIH parce que le médicament inhibe le développement du virus. Au cours des études, on a retrouvé plusieurs éléments dans l’apivirine comme les anti-inflammatoires, les flavonoïdes. L’apivirine a une autorisation de mise sur le marché.

 

Avez-vous des recommandations ?

 

C’est juste demander aux chercheurs de tout mettre en œuvre pour faire la phase trois de l’étude parce qu’elle sera bénéfique pour les chercheurs et la population. Le vaccin est utilisé quand on n’a pas encore contracté le Covid-19 et l’apivirine est utilisé quand on a la maladie.

 

Propos recueillis par Françoise DEMBELE

 

 

You may also read!

Lutte contre le paludisme : Le vaccin antipaludique R21/Matrix-M™ reçoit une autorisation de mise sur le marché au Burkina

Ceci est un communiqué de presse publié le 23 juillet 2023 par l’Unité de recherche clinique de Nanoro de

Read More...

Pr Georges  Ouédraogo : «Fumer favorise l’augmentation de la glycémie»

Diabète et tabac ? Peu de gens savent que « le tabagisme est diabétogène ». Dans cette interview, Pr Georges Ouédraogo, coordonnateur

Read More...

Centre de radiothérapie de Bogodogo : « Il y est prévu la gratuité des soins pour une catégorie de malades », dixit le premier ministre Apollinaire Kyelem

Le premier ministre Apollinaire Kyelem a exposé la situation de la nation à l’Assemblée législative de transition (ALT), ce

Read More...

Leave a reply:

Your email address will not be published.

Mobile Sliding Menu



GRATUIT
VOIR